Et comme si de rien n’était, la grande messe Oasis a (enfin) eu lieu

T’étais où quand on planait ? Le 9 août 2025 à Edimbourg, mon histoire avec l’un des groupes qui a le plus compté dans ma vie s’est vue ajoutée une nouvelle page inattendue, voir Oasis sur scène, en live. Une tournée démesurée, et des souvenirs pour la vie.

En réfléchissant à quelques pensées fusantes qui pourraient ouvrir cet article, la plus limpide me frappe encore le cerveau : je viens de voir Oasis. Près de 16 ans après la séparation chaotique des mancuniens, j’avais fait, très honnêtement, une croix sur tout espoir d’écrire ces lignes un jour. Voir même, progressivement abandonné cette envie, préférant vivre dans l’instant présent, en accordant mon temps et ma passion aux nouvelles formations, en cherchant par tous les moyens à ne pas me laisser consumé par une nostalgie écrasante.

Mais voilà, après 4789 rumeurs de reformation ayant usé mon taux d’attention, quand on ne s’y attendait plus vraiment, les frangins postent cette fameuse image et date commune. Nous y sommes. Le deal est scellé, câblage total. Dès lors, tout s’enchaîne : annonce de tournée UK et billetterie, file d’attente de l’enfer en mode Hunger Games, et finalement, planification de ce trip d’une vie : ce sera Edimbourg. Parce que 1) c’est ce qu’on a eu 2) c’est quand même la plus belle ville ce de royaume, eh. Et quand vient l’heure de prendre ce foutu avion (un an d’attente plus tard), tout semble encore irréel. Et s’ils se foutaient sur la gueule encore ? Et si Liam perdait sa voix ? Rien de tout ça. Trop d’enjeux touristiques, médiatiques, merchandising. Tout est verrouillé. On est désormais sur un deal d’une autre dimension. À peine le temps de zieuter quelques photos et vidéos qui surgissent sur les réseaux sur les premières dates de la tournée pour réaliser que tout ceci est bien vrai. Right here right now. This is history.

Si le motif pécunier de cette reformation paraît évident, il n’entrave en rien l’excitation du retour, dès lors que, comme moi, l’on n’en n’attend rien d’autre qu’une grande messe éphémère. Une dernière danse avant la consumation finale. Et c’est bien ce que fut cette date du 9 août 2025, deuxième des trois dates jouées à Edimbourg. En plus du meilleur contexte possible, à savoir voir un concert d’Oasis chez nos amis britanniques, le groupe donne l’impression de n’avoir jamais vraiment disparu. Après une première partie anecdotique (Cast), suivi du formidable Richard Ashcroft (ex-leader de The Verve, parfait pour le job) enchaînant les titres cultes de son groupe, Oasis débarque dans une formation hybride, entre membres historiques et nouveau venu (les Gallagher et Bonehead pour le line up originel, Andy Bell et Gem Archer à partir de 1999, et Joey Waronker en nouveau renfort à la batterie). Soniquement c’est la gifle. Le mur de trois guitares qui pousse fort, et les voix du duo sonnent comme jamais. La setlist, tout simplement inattaquable, est un best of qui fait l’étalage du nombre incalculables de tubes que possède le groupe (seul Little by Little et les titres de The Masterplan arrivent à lutter face aux deux premiers albums) tous intégralement chantés en choeur par le Murrayfield Stadium, qui prend conscience après chaque titre du moment unique qu’il est en train de vivre.

Alors que les vagues de hurlements de refrains percent chaque fois un peu plus mes tympans, c’est cette impression d’un groupe qui n’est jamais vraiment parti qui revient. Liam en parka, l’Epiphone de Noel toujours en place, et ces visuels façon mixe de live footage et de patchwork d’images, qui évoque dans le style la DA du dernier album du groupe, Dig Out Your Soul, en 2008. Comme une vieille machine laissée abandonnée dans un grenier, qu’on aurait dépoussiérer et qui remarche du tonnerre, Oasis reprend son trône. Seule ombre au tableau : musicalement, le groupe se contente du minimum. Des prestations qui semblent copiées/collées d’une date à l’autre, à l’impro près (cet ajout de Octopus’s Garden des Beatles sur Whatever), et un groupe qui ne se laisse plus du tout aller aux grandes phases instrumentales, voir expérimentales, de sa phase rock gods en 2000 (réécouter l’album live Familiar to Millions).

Oui, bon, c’était beaucoup demander. Surtout pour un rabibochage qui, rappelons-le si certains en doutent encore, reste très artificiel. Les Gallagher font loge à part, ne se voient assurément pas en dehors de la scène, et il est très probable qu’Oasis n’ait aucun avenir en dehors des différentes tournées qui se profilent. Mais après tout, a-t-on vraiment besoin de plus ? Le meilleur du groupe est derrière lui, et dans un contexte morose comme celui-ci, offrir cette parenthèse inattendue, cette communion générale à travers le monde, cette occasion de voir une fois dans sa vie une groupe qui nous aura offert les plus beaux moments du rock britannique, est déjà un miracle en soi. Profitons, chérissons ces moments, pensons futur, et toi et moi nous vivrons éternellement, comme dirait l’autre.